Abdoulaye Diop, chef de la diplomatie malienne: «Nous demandons que Paris nous respecte en tant que pays»
Le ton se durcit un peu plus entre Paris et Bamako. Jeudi 27 janvier, le ministre français des Affaires étrangères a critiqué une junte « illégitime », qui prend des « mesures irresponsables ». Réponse de son homologue malien Abdoulaye Diop, dans une interview exclusive RFI/ France 24 accordée à Christophe Boisbouvier et Marc Perelman : il condamne les propos du responsable français.
En exclusivité sur RFI et France 24, le chef de la diplomatie malienne ne mâche pas ses mots. En réaction à son homologue français Jean-Yves Le Drian, qui a dénoncé les mesures « irresponsables » des autorités « illégitimes » du Mali à propos de la demande de retrait des forces danoises, Abdoulaye Diop réplique que « ces insultes et ces propos empreints de mépris sont inacceptables et ne sont pas une preuve de grandeur ». Le ministre malien ajoute que son pays est prêt, le cas échéant, à dénoncer l’accord de défense conclu avec la France, parce que « certaines dispositions sont contraires à la Constitution et à la souveraineté du Mali ». Il en a demandé récemment la révision à Paris et « attend une réponse rapide de Paris ».
La junte malienne va-t-elle demander le départ des troupes françaises, comme elle l’a fait avec les forces spéciales danoises ? « Cette question n’est pas pour le moment sur la table », répond Abdoulaye Diop, qui précise : « Si une présence à un moment donné est jugée contraire aux intérêts du Mali, nous n’hésiterons pas à nous assumer, mais nous n’en sommes pas là. » Le dialogue est-il rompu entre MM. Diop et Le Drian ? « Dommage qu’on entende davantage Jean-Yves Le Drian sur les médias qu’ailleurs, dit Abdoulaye Diop, mais le Mali reste ouvert au dialogue. La France applaudit les coups d’État quand ils vont dans le sens de ses intérêts et les condamne quand ils vont dans un sens contraire à ses intérêts. » Le ministre malien pense-t-il au Tchad ? « Je ne pense à rien », répond-il, diplomatiquement…
Pour l’instant, la junte malienne se donne un mandat de cinq ans avant de rendre le pouvoir aux civils, mais le chef de la diplomatie malienne n’écarte pas une réduction de la durée de cette transition. La junte pourrait-elle accepter une transition de seize mois, comme le propose le président algérien Abdelmajid Tebboune ? « Nous ne nous focalisons pas sur une durée de seize mois, deux ans ou trois ans à ce stade, mais nous voulons qu’on regarde ce qui est important pour le peuple malien », répond Abdoulaye Diop. Enfin, le ministre malien appelle la Cédéao à plus de souplesse à l’égard de son pays. Pour lui, le coup d’État du 24 janvier au Burkina est la preuve que les sanctions Cédéao du 9 janvier contre le Mali ont été « inefficaces ».
rfi